Découvrez la synthèse de notre indicateur hebdomadaire, mis en place durant la crise sanitaire liée au Covid-19, en partenariat avec l'Entreprise DU FUTUR. 

H comme "Humain" : pour les dirigeants de PME et ETI, HEROS de l’Entreprise du FUTUR, le capital Humain se place au centre de leurs préoccupations afin d'accélérer la reprise. La période de confinement a profondément bouleversé l'organisation des modes de travail. Mais cette situation a également engendré des mutations plus profondes. 83% des entreprises interrogées songent en effet à revoir leur organisation suite à cette expérience.

 

Interview Thomas Cornet WITTYFIT

 

 

 

Interview de Thomas CORNET, Directeur Général de WITTYFIT

WITTYFIT est une plateforme d'engagement et de pilotage de la Qualité de Vie au Travail, issue d’un partenariat avec le CHU de Clermont-Ferrand. Grâce à une méthode unique de captation des ressentis, cet outil de pilotage et d’aide à la décision, accompagne les entreprises dans leurs pratiques managériales et leur conduite du changement. WITTYFIT permet ainsi à l’entreprise d’initier une démarche qui la recentre sur l’Humain.

Chiffres clés Indicateur HumainQ : Quel est l’impact des nouveaux modes de travail sur les pratiques managériales ?

Thomas CORNET : Le management va devoir évoluer, c’est indéniable. Ce constat est renforcé par les 2 indicateurs que nous avons mis en place chez nos clients, pour les accompagner durant le confinement. Ces indicateurs ont été utilisés par des entreprises très différentes, comme Botanic, Thales LAS, Thales Alenia Space, Thales Services, Storengy, AESIO, Publicis Conseil ou encore GRTGaz. Cela représente quasiment 30 000 collaborateurs.

Le premier indicateur portait sur « l’adaptation de l’entreprise face au coronavirus ». L’enseignement que nous en avons tiré est que les collaborateurs et managers étaient plutôt confiants, notamment grâce au soutien apporté par le gouvernement.

L’évolution du travail s’est dans un 1er temps bien passée, grâce à une très forte réorganisation naturelle et collective chez l’ensemble de nos clients. A tel point que nous avons noté des résultats meilleurs que d’habitude sur certains indicateurs.

A partir du 2ème mois de confinement, il y a eu une attente de plus en plus forte vis-à-vis du management et de l’organisation. Notamment concernant le respect du collectif, de la proximité et de l’échange d’information. Ce qui signifie que le manager doit apprendre à faire circuler l’information pour que son équipe soit alignée par rapport à la trajectoire définie.

Le deuxième indicateur portait sur « les conditions de reprise ».  Après l’étape du déconfinement, nous sommes rentrés dans une période d’activité complètement différente, durant laquelle il faut relancer l’appareil de production, les équipes, l’entreprise, la vision, les hommes et les femmes.

Au travers des résultats de cet indicateur, nous avons constaté un besoin d’évolution de l’organisation, ainsi que des outils digitaux et des postures managériales, notamment au travers du télétravail. Ce qui signifie que le manager doit changer de position pour se mettre à la disposition et en soutien des équipes, à un rythme régulier. Mais sans pour autant casser l’autonomie des collaborateurs et le collectif qui s’étaient mis en place naturellement au sein des équipes.

En résumé, si l’organisation du travail évolue vers plus d’autonomie, de télétravail et de digital, il est évident que les pratiques managériales doivent s’adapter. Les softskills doivent rentrer dans l’air du digital et faire face à de nouvelles problématiques. Par exemple : comment manager des équipes à la fois en présentiel et en distanciel, gérer le planning des présences ou encore comment gérer une dynamique d’équipe au fil du temps ?

Le management de proximité est plutôt en faveur de ces évolutions. Globalement, c’est plutôt le top management qui est récalcitrant. Il faut donc l’aider à « s’acculturer » et le faire évoluer pour qu’il prenne les rôles de leader et sponsor sur ces sujets.

Q : Quel est l’impact des nouveaux modes de travail sur l’engagement et le sentiment d’appartenance ?

Thomas CORNET : Dans les conditions de reprise, il y a deux questions, une sur la mobilisation et une sur le sentiment d’appartenance. Des notions relatives à la culture de l’entreprise.

Nous constatons que la mobilisation et le sentiment d’appartenance sont plutôt renforcés en ces temps inédits, durant lesquels l’incertitude revient au galop, notamment au niveau des plans sociaux. Il y a une réelle volonté des collaborateurs de se mobiliser pour s’en sortir. En revanche, les collaborateurs ne feront pas la dichotomie entre cette mobilisation et leur qualité de vie au travail.

L’évolution des modes de travail vers plus de distanciel va donc exacerber ce type de tension entre l’engagement des salariés et la préservation de leur qualité de vie au travail. Si les managers ne prennent pas en compte ces éléments, cela va renforcer la volatilité des collaborateurs. Et inévitablement, engendrer une course à la captation des talents.

Q : Quels sont les risques de ces nouveaux modes de travail ?

Thomas CORNET : Je vais me faire le porte-parole de l’un de nos clients sur ce sujet qui est Thales. Dans nos indicateurs précédents chez Thales LAS, nous avions un indicateur sur la satisfaction au travail et le stress.

Le premier facteur de stress est « l’interruption », c’est-à-dire « comment gérer une journée qui est découpée en mille morceaux ? ». D’après les managers et les collaborateurs, le fait de pouvoir mettre en place une mixité de présence (à distance et sur site), a favorisé un cadre de travail beaucoup plus productif. Moins d’interruption, donc une baisse de la charge mentale. Ce qui permet de réaliser une mission plus rapidement et de meilleure qualité.

Aujourd’hui, l’un des enjeux chez Thales LAS, est de trouver le bon curseur, équipe par équipe, afin de répondre à : « comment je mets en place, en fonction des métiers, un cadre de travail et une organisation qui permettraient de retrouver cette productivité et cette performance ? ».

Mais le vrai risque lié au télétravail, serait plutôt la charge de travail. L’ensemble de notre méthodologie a fait l’objet d’un travail de R&D avec le CHU de Clermont Ferrand. D’après les études qu’ils ont pu mener, il y a des côtés positifs, comme le fait de ne pas perdre de temps lors des trajets ou encore l’organisation de sa journée qui est facilitée….

En revanche, le sentiment général des collaborateurs qui ont télétravaillé est qu'un cumul de charge s'opère. Lorsque nous sommes dans les locaux d’une entreprise, il y a des breaks naturels (machine à café, ascenseurs, échange avec un autre collaborateur…). Alors que lorsque nous télétravaillons de manière isolée, nous sommes beaucoup plus disponibles, avec un cumul de pression et de charge de travail. Il y a donc derrière un risque psychosocial très fort.

En conclusion, si chaque modèle a des avantages et des inconvénients, le télétravail va poser certaines problématiques, notamment autour de la charge de travail et de la communication interne. Par ailleurs, le télétravail peut être clivant. Il ne faudrait donc pas créer une cassure dans l’entreprise entre les métiers manuels et les métiers intellectuels. D’autant plus que cette fracture risque de s’accélérer notamment avec le digital.