La loi Waserman du 21 mars 2022, qui est entrée en vigueur le 1er septembre 2022, vient transposer une directive européenne du 23 octobre 2019 et compléter la loi Sapin 2 afin notamment d’améliorer la protection des lanceurs d’alerte. Une mise en conformité est donc nécessaire pour que votre dispositif de signalement des alertes respecte les nouvelles dispositions.

Pour rappel, la loi Sapin 2, datant de décembre 2016, vise à renforcer la transparence et la lutte contre la corruption et le trafic d’influence. Cette loi concerne les entreprises de plus de 500 salariés et dont le chiffre d’affaires est supérieur à 100 millions d’euros.

Quels sont les impacts de la loi Waserman sur la protection des lanceurs d’alerte ?

Modification de la définition du "lanceur d'alerte"

La loi Waserman élargit la notion de lanceur d’alerte qui est dorénavant définie comme : « personne physique qui signale ou divulgue, sans contrepartie financière directe et de bonne foi, des informations portant sur un crime, un délit, une menace ou un préjudice pour l'intérêt général, une violation ou une tentative de dissimulation d'une violation d'un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d'un acte unilatéral d'une organisation internationale pris sur le fondement d'un tel engagement, du droit de l'Union européenne, de la loi ou du règlement. Lorsque les informations n'ont pas été obtenues dans le cadre des activités professionnelles mentionnées au I de l'article 8, le lanceur d'alerte doit en avoir eu personnellement connaissance ».

Cette nouvelle définition :

  • Supprime la notion de « désintéressement » et la remplace par la notion d’« absence de contrepartie financière directe ».
  • Supprime la notion de gravité requise jusqu’alors pour les menaces ou préjudices pour l’intérêt général, ainsi que pour la violation des engagements internationaux, de la loi ou du règlement.
  • Interdit le signalement d’informations couvertes par le secret de la défense nationale, le secret médical, le secret des délibérations judicaires, le secret de l’enquête ou de l’instruction, ou le secret professionnel de l’avocat.
  • Dispense le lanceur d’alerte ayant obtenu les informations dans le cadre professionnel d’avoir eu personnellement connaissance de ceux-ci.

Extension des bénéficiaires du statut de lanceur d'alerte

La protection offerte au lanceur d’alerte est étendue :

  • Aux facilitateurs, c’est-à-dire aux tiers qui aident le lanceur d’alerte à effectuer un signalement. Il peut s’agir de personnes physiques ou de personnes morales telles qu’un syndicat ou une association.
  • Aux personnes physiques en lien avec le lanceur d’alerte susceptibles de faire l’objet d’une mesure de rétorsion dans le cadre professionnel de la part de leur employeur ou de leur client.
  • Aux entités juridiques contrôlées par un lanceur d’alerte, pour lesquelles il travaille.

Mise à jour de la procédure de recueil des signalements

La loi Waserman assouplit la procédure de recueil et de traitement des signalements. Pour en savoir plus sur le nouveau dispositif de signalement devant être mis en place ou mis à jour consultez le replay de notre dernier webinar sur la protection des lanceurs d’alerte.

Garanties et protections offertes aux lanceurs d'alerte 

Les garanties et protections offertes aux lanceurs d’alerte ont significativement été renforcées par la loi Waserman.

Désormais, les garanties et mesures judiciaires dont peuvent bénéficier les lanceurs d’alerte sont les suivantes :

  • Immunité civile et pénale offerte au lanceur d’alerte
  • Bénéfice d’une provision pouvant être allouée par les juges en cas de recours contre une mesure de rétorsion
  • Mesure de soutien psychologique et soutien financier temporaire
  • Compétence du juge des référés en cas de contestation d’un licenciement consécutif au signalement d’une alerte
  • Sanction pénale prévue pour tout obstacle à la transmission d’un signalement et amende civile de 60 000€ encourue par toute personne qui agit en justice contre un lanceur d’alerte de façon dilatoire ou abusive

Sont également interdites toutes les mesures de rétorsion ou de discrimination contre les lanceurs d’alerte (sous peine de nullité) ainsi que la nullité des mesures visant à faire renoncer au lanceur d’alerte les droits dont il bénéficie.

Comment mettre en conformité votre dispositif d'alerte ? 

Pour que votre entreprise soit conforme à la nouvelle loi Waserman, votre dispositif de signalement des alertes doit être mis à jour. Voici les étapes à suivre : 

  1. Mettre à jour votre dispositif de recueil et de traitement des alertes. Le cas échéant, adapter/mettre en place un dispositif de recueil et de traitement des alertes au niveau de votre entreprise.
  2. Désigner le destinataire des alertes (interne ou externe).
  3. Consulter vos représentants du personnel sur le projet de charte de recueil et de traitement des alertes modifiée (avant le 1er septembre 2022).
  4. Intégrer dans le règlement intérieur de votre entreprise une mention quant à l’existence du dispositif de protection des lanceurs d’alerte.
  5. Modifier les affichages obligatoires.
  6. Communiquer en interne sur le dispositif de recueil et de traitement des alertes modifié et, le cas échéant, former vos salariés.

Pour rappel, qu'est-ce que la loi Sapin 2 ?

Pour tout savoir sur la loi Sapin 2, consultez notre article dédié.

La loi Sapin 2 n° 2016-1961 du 9 décembre 2016 relative à la lutte contre la corruption, à la modernisation de la vie économique et à la transparence vise essentiellement à atteindre trois objectifs :

  • Instaurer plus de transparence dans le processus d’élaboration des décisions publiques et dans la vie économique.
  • Prévenir et détecter la corruption et les trafics d’influence en France ou à l’étranger en fonction des risques de l’entreprise en rendant obligatoire la prévention et la détection des faits de corruption ou de trafic d’influence.
  • Protéger les lanceurs d’alerte.

Quelles sont les entreprises concernées par cette loi ?

Les sociétés assujetties à l’obligation de prévention et de détection des faits de corruption et de trafic d’influence sont :

  • Les entreprises françaises dont le siège social est en France, de plus de 500 salariés et réalisant un chiffre d’affaires consolidé ou non supérieur à 100 millions d’euros. Lorsque la société établit des comptes consolidés, les obligations définies portent sur la société elle-même ainsi que sur l’ensemble de ses filiales.
  • Les établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) employant au moins 500 salariés, ou appartenant à un groupe public dont l’effectif comprend au moins 500 salariés et dont le chiffre d’affaires est supérieur à 100 millions d’euros.

Bon à savoir : Même si ces seuils ne sont pas atteints, les entreprises d’au moins 50 salariés sont toutefois tenues de mettre en place une procédure appropriée de recueil des signalements.

Quelles sont les mesures obligatoires instaurées par la loi Sapin 2 ? 

8 piliers sont prévus par la Loi Sapin 2. L’article 17 de la loi Sapin prévoit que les entreprises assujetties doivent adopter les procédures et mesures suivantes :

  • Code de conduite, illustrant les différents types de comportements à proscrire susceptibles de caractériser des faits de corruption ou de trafic d’influence
  • Un dispositif d’alerte interne pour recueillir les signalements
  • Une cartographie des risques destinée à identifier et analyser les risques d’exposition de la société
  • Des procédures d’évaluation de la situation des clients, fournisseurs au regard de la cartographie des risques
  • Des procédures de contrôle comptables, internes ou externes, pour vérifier que les comptes ne soient pas utilisés pour masquer des faits de corruption ou de trafic d’influence
  • Un dispositif de formation destiné aux cadres et aux personnels les plus exposés aux risques de corruption et de trafic d’influence
  • Un régime disciplinaire permettant de sanctionner les salariés de la société en cas de violation du code de conduite de la société
  • Un dispositif de contrôle et d’évaluation interne